Donizetti : Anna Bolena - Saluts / Curtain fall - Rebeka Deshayes Schrott / Benini - Paris, 11/04/22

[Opéra] Anna Bolena au TCE : jubilatoire !
Un amant fidèle ou un époux cruel ? Anne Boleyn a le choix de la reine sous le règne d'Henry VIII : on comprend son chagrin et sa folie. En 1830 le jeune Donizetti signe son 1er chef-d'oeuvre, plus tard dernier volet de la trilogie des Tudor. Milan qui veut ravir le compositeur à Naples lui offre la Pasta et Rubini sur un plateau. Un choix... de roi !
Malmené par les virus, le casting du TCE a-t-il gagné au change ? Il a de fait et de loin, tout pour servir la prouesse et le charme réunis par Donizetti. Les deux dames rivales aux yeux d'Henry sont sur scène, chacune une reine, la soprano dramatique - "au timbre slave" me souffle mon voisin connaisseur et doué pour les images - et la Seymour au velours riche et agile de Karine Deshayes, et toutes les deux complices : la salle fond et chavire. Rappelé de son exil pour servir les desseins d'Henry, Percy aussi nous en met plein les oreilles : un ténor puissant et droit dans ses notes, qui s'expose, articule et ornemente, à quoi bon bouder son plaisir ? Henry a le port royal et la voix majestueuse, comme il se doit et sombre quand il le faut, d'un Erwin Schrott investi ici et ce soir comme pour une mise en scène - il en va de même pour ses consoeurs et confrères dont nous partageons la moindre émotion. Le frère de la Reine a les couleurs nuancées et le timbre franc et sincère de Matthieu Lécroart. À ses côtés Smeaton, soumis, manipulé, ouvre de sa voix chaude et sensible les abimes du tourment et des remords. Raphaël Bremard est un Sir Harvey précis et fidèle, impeccable et implacable. Le choeur fort sollicité dans de nombreux formats, brille par son engagement et son équilibre. Maurizio Bennini dirige tout ce monde et nous invite à sa suite, dans son jardin : le bel canto romantique. L'orchestre en ligne et précis, s'y sent aussi comme chez lui, et fait valoir une grande saveur de timbres. Le plaisir pris par ce plateau d'excellence gagne la salle qui exulte, bien avant les saluts finaux. Sublime soirée, où la version dite "de concert" emplit nos coeurs et nos âmes sans nul autre besoin, décor ou mise en scène.
Anna Bolena
Gaetano Donizetti
Livret : Felice Romani
Marina Rebeka | Anne Boleyn
Karine Deshayes | Jane Seymour
Erwin Schrott | Henri VIII
Enea Scala | Lord Richard Percy
Matthieu Lécroart | Lord Rochefort
Raphael Bremard | Sir Hervey
Héloïse Mas | Smeaton
Maurizio Benini | direction
Orchestre de chambre de Paris
Ensemble Lyrique Champagne-Ardenne - direction : Sandrine Lebec
Paris, Théâtre des Champs-Elysées - Lundi 11 avril 2022
Coproduction TCE / Les Grandes Voix - Les Grands Solistes

[@francoisegareau9411]

Quel dommage qu il n y ait pas de version opéra complet de Ana Bolena ou I Puritani en France !